Canton de Soissons (Aisne)
rédigée par l’instituteur du village
cote aux Archives Départementales : 13 T 151
I) Géographie physique
Situation astronomique – Etendue – Territoire – Terroir – Ses divisions, hameaux, etc
Cuffies, commune du canton et de l’arrondissement de Soissons, à 3 kilomètres de cette ville, est située par 49° 23 ‘’ de latitude nord et 0° 59’ 18’’ de longitude est du méridien de Paris.
Son territoire, d’une étendue superficielle de 505 hectares 15 ares, est limité au nord par la commune de Leury, à l’est par celle de Crouy, au sud par Soissons et à l’ouest par Pasly.
La surface occupée par les constructions, les chemins, place, etc, est de 28 hectares. La superficie du terroir proprement dit se réduit donc à 477 ha 15 a dont 6 ha 60 ca de terrain non cultivable.
Il n’existe pas de hameaux, mais une section très importante à un kilomètre sud du chef lieu, c’est la verrerie dite de Vauxrot comptant 750 habitants et ayant dans son voisinage quelques habitations portant le nom du même lieu.
Au lieu dit le Mont de Cuffies, à 500 mètres environ au nord de la commune se trouvent une ferme et quelques maisons aux environs.
Noms successifs qu’aurait portés la commune
Ce village a toujours porté le même nom. Autrefois il s’écrivait Cuffy. Depuis 1811 son nom s’orthographie Cuffies.
Relief du sol – Plateaux et plaines
Le territoire très accidenté est situé dans un étroit vallon entouré de collines de 80 à 90 mètres d’altitude. La commune n’a d’accès dans la vallée de l’Aisne que d’un seul côté, du nord au sud.
Le village est bâti au fond de la vallée, et la verrerie tout près de la rive droite de l’Aisne et au pied d’une colline. En face s’étend la plaine de Saint Médard lez Soissons.
Un assez vaste plateau s’étend entre Cuffies et la vallée de la Lette, affluent de l’Oise.
Météorologie
Cuffies appartient au climat séquanien. Les vents dominants sont ceux de l’Ouest, du Sud et du Nord-Est. Les vents pluvieux nous arrivent surtout de l’ouest. Les froids ne sont pas excessifs, ni les chaleurs trop fortes.
Géologie
Le flanc de toutes les collines du territoire n’offre qu’un terrain calcaire parfois sablonneux, mais presque jamais argileux. Le plateau est une terre argileuse – siliceuse reposant sur un sous sol de tuf ou de sable. Vient ensuite le calcaire grossier dont on tire de la pierre de taille s’il est tendre, et des matériaux pour l’entretien des chemins s’il est dur. Le sable forme le sous sol sur le flanc des collines. Dans le vallon, il présente des sables, du gravier dans lequel sourdent des filets d’eau alimentant les puits peu profonds du pays.
Hydrographie
Un mince ruisseau prend sa source près de la ferme du Mont de Cuffies, à environ 20 mètres en contrebas du plateau. Il traverse la commune dans toute sa longueur sous un aqueduc de 825 mètres, construit en 1848. Ce ruisseau coule ensuite à ciel ouvert pendant 1250 mètres et va se jeter dans l’Aisne sur sa rive droite. Son volume s’est doublé dans son parcours par plusieurs petites sources qui surgissent de chaque côté du vallon.
Au sud, l’Aisne limite la commune de Cuffies avec celle de Soissons.
Bois
Les bois occupent une superficie de 59 ha 75 a.
Les essences dominantes sont l’orme, le frêne, le bouleau, le saule boursault, le coudrier, l’aune.
Faune et flore
Les lièvres, lapins, perdrix, cailles sont peu abondants. On y voit quelques renards, de rares blaireaux et quantité de fouines, de belettes, de putois.
Les rats, les souris et les mulots foisonnent partout, causent beaucoup de dégâts et font parfois le désespoir du cultivateur.
La flore de Cuffies est la même que celle de tout le Soissonnais.
Chiffre de la population
La population de Cuffies est de 1286 habitants, elle était en 1830 de 650 habitants, en 1840 de 808 habitants, en1850 de 1052 habitants, en 1861 de 1160 habitants.
Depuis 1828, époque de l’établissement de la verrerie, la progression a été constante.
Les habitants du chef lieu, pays essentiellement agricole, sont généralement doués d’une constitution robuste, aptes à supporter les incessantes fatigues de la culture et des variations atmosphériques si fréquentes de nos climats.
La vie moyenne dépasse 60 ans et les personnes atteignant 80 ans ne sont pas rares.
Mœurs et caractères des habitants
Malgré le voisinage de la ville, les mœurs restent simples, les caractères faciles. Les ouvriers des champs sont encore sobres et économes. L’alcoolisme, cette plaie sociale, apparaît plutôt chez l’ouvrier des fabriques.
L’habitant semble froid, indifférent, mais ces dehors cachent un cœur bon et généreux. La population agricole est stable. Vauxrot diffère sous plusieurs rapports du chef-lieu : les caractères sont surtout plus ouverts, le sang plus chaud, le besoin de distractions plus prononcé. Le travail des fours auquel les ouvriers sont soumis altère leur santé et abrège leurs jours.
II) Géographie historique
Eglise – Chapelle
La commune de Cuffies ne possède qu’une église sous le vocable de Saint Martin, mort évêque de Tours en 400.
Reconstruite en très grande partie en1863, elle n’offre aucun caractère architectonique méritant une description. On n’y voit ni sculpture, ni peinture murale, ni pierres tombales, ni tapisseries, ni mobilier ancien. Cinq vitraux sortis des ateliers d’une maison de Metz, qui y ont été placés il y a une quinzaine d’année, et un tableau de St Martin peint par Adam en1842, voilà les seuls objets quelque peu remarquables à mentionner. Sa longueur intérieure est de 27 m 70.
Depuis 1874 existe dans l’intérieur de Vauxrot une chapelle privée pour l’usage exclusif de sa population. C’est une ancienne halle pour la fabrication du verre, appropriée pour les cérémonies du culte. Elle ne présente rien de remarquable.
Cimetière
Sur le plateau, près de la ferme du Mont de Cuffies, on a soulevé, en extrayant des pierres calcaires destinées à la vicinalité, des cercueils en pierre calcaire grossière, à une profondeur de 50 à 70 centimètres seulement. Ils renferment des débris d’ossements à moitié pulvérisés, mais aucune sculpture, aucune pièce de monnaie, médaille ou autre objet n’existent sur ou dans ces tombes. L’endroit où se trouve cet ancien cimetière s’appelle les moines. A-t-il existé sur ce plateau, à la place de la ferme actuelle ou dans les environs, un couvent de moines ? Cet ancien cimetière était-il à leur usage ou avait-il une autre destination ? Nul ne le sait à Cuffies. Rien ne renseigne sur ce qui a dû exister à une époque qui peut remonter au 10e siècle.
Ancien château
Il n’existe aucun ancien château à Cuffies, mais seulement une ancienne maison bourgeoise portant autrefois le nom de fief de Nouvron. Son propriétaire était tenu à foi et hommage envers l’évêque de Soissons et au paiement annuel d’une redevance de 6 livres.
L’Evêché, les religieux de Saint Léger, ceux de Saint Jean des Vignes, le chapitre de Saint Waast, le couvent de Saint Crépin en Chaye et l’abbaye Saint Paul possédaient ensemble sur Cuffies 176 hectares de terrains productifs, déclaré biens nationaux suivant la loi des 25, 26, 29 juin et 9 juillet 1790 et vendus comme tels après la loi du 11 9bre 1790.
Documents historiques que présentent les archives
Des archives communales, on ne peut guère citer que deux registres des délibérations et actes municipaux embrassant les années 1788 au 27 avril 1795.
Suivent des extraits ou analyses sommaires pouvant avoir quelque intérêt historique local
7 février 1790 : Constitution de la nouvelle municipalité
27 juin 1790 : Constitution et nomination de la nouvelle municipalité
4 juillet 1790 : Célébration de cette fête. Enthousiasme universel, messe sur la place publique, prestation de serment, Te Deum, jeux, illuminations, cris de joie, effusion des cœurs, serrements des mains, exubérance de sentiments patriotiques.
12 7bre 1790 : Récolement des biens nationaux ayant appartenu à l’Eglise, aux communautés et établissement religieux de Soissons (abbaye de Saint Paul lez Soissons, de Saint Crépin en Chaye, de Notre Dame des Vignes, chanoines de Saint Waast). Ce récolement, fait en vue par la commune d’acquérir les dits biens, s’élève à 150ha. La commune n’a rien acquis.
26 7bre 1790 : Fête au sujet de la réception des officiers de la garde nationale, bénédiction d’un drapeau, nomination d’un aumônier. Messe solennelle, revue, salves de boîtes et de fusils, repas champêtre, santés répétées à la nation, au roi et à l’auguste assemblée nationale.
16 8bre 1790 : Les 20 religieuses de l’abbaye de Saint Paul, renfermée dans les limites de la paroisse de Cuffies et à ce titre dépendante de la municipalité, consentent à quitter le couvent. (exécution du décret du 13 février 1790 portant prohibition des vœux monastiques en France)
L’abbesse de Berteuil persiste d’abord à y rester mais ne pouvant vivre seule, quitte le couvent le 30 8bre 1790.
1er janvier 1791 : Prestation de serment de Jean Baptiste Gaudron curé et maire de la commune. Il a exercé cette dernière fonction jusqu’au 14 7bre 1792. Il s’est marié et a tenu école à Cuffies.
8 8bre 1792 : Première réquisition de chevaux et voitures au citoyen Caillaux fermier. Le 13 9bre suivant autre réquisition au même pour blé.
Du 23 mars 1793 au 4 mars 1795 : Le conseil municipal a tenu 178 séances, parfois 5,6 et 7 par jour. Elles ont eu pour objets principaux 53 réquisitions d’énormes quantités de blé, méteil, seigle, avoine, paille, foin destinées à l’approvisionnement des armées de la république, des villes de Paris, Lille, Maubeuge, Valenciennes, Laon et Soissons. Réquisitions de prisonniers pour les travaux de défense à Valenciennes, de chevaux, mulets et voitures pour toutes espèces de transport, de chevaux pour la remonte de l’armée, de légumes secs et viandes salées, de couvertures, chemise, linge, bas, souliers, charpie pour les soldats, de moissonneurs, batteurs en grange pour couper les céréales, les rentrer, les battre chez les cultivateurs et être immédiatement réquisitionnées.
Parmi les autres sujets dont le conseil a dû s’occuper nous citerons
1) Consentement de la municipalité de livrer 3 cloches de l’église ; elle supplie l’autorité supérieure de lui laisser la plus grosse pour timbre de l’horloge. Ces cloches avaient été fondues le 7 avril 1788.
2) Injonction aux citoyennes de porter la cocarde nationale, sinon suspectées et dénoncées comme telles.
3) Injonction à la municipalité de faire disparaître les fleurs de lys, les armoiries et tous les signes qui peuvent rappeler l’ancien régime ; de descendre la croix du clocher, de retourner les plaques de cheminée qui portent des fleurs de lys.
4) Injonction par la municipalité à tous les habitants de célébrer, au nom de la liberté, les décadi et de ne se livrer ce jour-là à aucun travail.
5) Injonction à la municipalité de fournir sans désemparer un volontaire national pour remplacer un des 7 fournis précédemment, et revenu dans sa famille pour cause de maladie. Les citoyens ont dû pourvoir, comme pour les autres, à son habillement.
A compter du 4 mars 1795, les réquisitions ont cessé.
Historique de l’instruction dans la commune avant 1833
L’état de l’instruction primaire de 1790 à 1802 n’est constaté par aucun document et les 3 instituteurs qui s’y sont succédé n’ont fait que passer sans laisser trace de leur exercice. Mais à partir de 1802 l’organisation apparaît.
Pendant ce premier quart de siècle et même plus, l’instituteur recevait de chaque ménage aisé, annuellement, un pichet de blé (23litres) et 1 franc, des autres ½ pichet et 1 franc ; les mois d’école étaient de 30, 40 et 60 centimes selon le degré d’instruction des enfants. Aux pressurages, l’instituteur recueillait du vin et au carême il ramassait des fagots de vigne. Il était tenu de faire la classe toute l’année, excepté pendant la moisson et la vendange ; il chantait à tous les offices de l’église, la balayait tous les samedis, assistait le curé dans plusieurs de ses fonctions, faisait le catéchisme, sonnait l’angélus, portait l’eau bénite chaque semaine dans toutes les maisons du village. L’installation matérielle de l’école était déplorable. L’instituteur faisait la classe dans un fournil humide, obscur. Une planche clouée sur des pieux servait de table. Le mobilier d’enseignement était nul.
En 1843 la commune fit construire l’école actuelle pour recevoir 60 élèves.
Les propriétaires de la verrerie de Vauxrot ont fondé pour les enfants de leurs ouvriers les écoles libres de garçons et de filles et une salle d’asile.
III) Géographie économique
Etat des terres, assolement, engrais, instruments aratoires
L’assolement est généralement triennal. La rotation est la suivante sur les plateaux : 1ère année, froment ; 2ème année, avoine et 3ème année, plante industrielle (betterave à sucre).
Sur les pentes, le froment et le sigle en 1ère année ; les prés artificiels et l’avoine la 2ème ; les pommes de terre et les légumes la 3ème année. Les jachères sont complètement abandonnées. L’engrais le plus généralement employé est le fumier. Les principaux cultivateurs emploient en outre les engrais chimiques.
La charrue usitée est le brabant. On se sert aussi de l’extirpateur appelé trucille, de la herse en bois, du rouleau plein en bois ou articulé en fonte. Les récoltes sont battues par des machines à battre mues par des chevaux ou par la vapeur.
Céréales
Les céréales sont le blé de pays et le blé rouge ; le sigle, l’avoine blanche et l’avoine noire, l’avoine à franges ou de Brie.
Prairies
La commune n’a pas de prairies naturelles. Les prairies artificielles occupent une étendue approximative de 75 hectares.
Arbres fruitiers – Vignes
Le rigoureux hiver de 1879–1880 a détruit presque entièrement les arbres fruitiers existant dans la commune. Il reste quelques cerisiers dans les côtés, quelques rares poiriers dans les jardins. Pour combler les vides on fait de nouvelles plantations notamment en pommiers.
En 1811 Cuffies avait 76 hectares de vignes, 46 ha en 1847 ; elles sont réduites aujourd’hui à 7 ha environ.
Betteraves
La culture des betteraves occupe plus de 50 hectares. Ces racines produisent en moyenne 30 000 kg à l’ha. Elles sont conduites à la distillerie de Vauxrot – Soissons, à la sucrerie de Villeneuve ou à celle de Pommiers. Une partie de la récolte est conservée pour la consommation des bestiaux pendant l’hiver.
Autres cultures
Les autres plantes cultivées pour la consommation des habitants de la commune ou pour celle de leurs animaux sont la pomme de terre, la carotte, le navet, les pois, les haricots, les fèves, la vesce, la bisaille, etc…
Animaux domestiques
On compte dans la commune 65 chevaux, 50 ânes, quelques bœufs de travail et quelques taureaux.
Les vaches au nombre de 85 servent surtout à la production du lait vendu chaque matin à Soissons. Les bêtes de laine atteignent environ le chiffre de 250.
Il y a quelques chèvres, environ 90 porcs et 25 ruches d’abeille.
Animaux nuisibles et insectes utiles
Ces animaux sont indiqués à l’art. faune. Les insectes utiles sont ceux de la région soissonnaise.
Chasse – Pêche
Peu de chasseurs. Le gibier se compose de lièvres, de lapins de garenne, de perdrix et de cailles.
La pêche à la ligne est le passe temps favori des verriers.
Carrières
Deux carrières de calcaire grossier et tendre sont ouvertes et exploitées sur le territoire de Cuffies.
Usines et manufactures
La verrerie de Vauxrot est la seule usine de la commune mais elle est fort importante. Elle emploie environ 250 ouvriers de diverses conditions recevant un salaire assez élevé. Presque tous logent dans l’intérieur de l’établissement.